Intervention de Yannick Monnet

Séance en hémicycle du mardi 11 avril 2023 à 21h30
Garantir le respect du droit à l'image des enfants — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Monnet :

La motion de rejet préalable de la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France exprime donc à la fois un désaccord et une exigence.

Le désaccord porte sur la forme, la méthode et le fond. Nous sommes face à un texte parcellaire, même s'il traite de sujets importants tels que la lutte contre la maltraitance ou la création d'une carte professionnelle. D'autres, comme l'organisation de la conférence nationale de l'autonomie, concernent la structuration du système et auraient mérité une étude d'impact. D'autres, enfin, constituent une proposition de loi dans la proposition de loi : je pense au titre II bis, introduit par des amendements des rapporteures en commission, qui prévoit l'application du principe de subsidiarité aux personnes protégées. Ce sujet aurait à tout le moins mérité l'expertise de la commission des lois.

Cette PPL est donc une accumulation de dispositions inégales, parfois incongrues, qui ne dessinent ni une unité intellectuelle, ni une unité d'action. Parce qu'il y manque une orientation politique, ces dispositions ne bâtissent rien. Elles tentent tout juste de colmater quelques brèches et traitent de la forme, mais jamais du fond, le texte contournant tous les problèmes structurels liés au grand âge. Il est pourtant urgent de discuter de ces problèmes si nous voulons savoir quelle société du bien vieillir nous entendons bâtir.

Quelles orientations et quels financements assignons-nous à la cinquième branche de la sécurité sociale dédiée à l'autonomie, pour qu'elle soit le cadre et l'outil d'une réforme structurelle du grand âge ? Comment rendre accessibles les Ehpad et réduire drastiquement le reste à charge ? Comment revaloriser la profession ? Sans aborder le problème des rémunérations, largement insuffisantes, comment donnerons-nous à ces professionnels qualifiés et dévoués les moyens d'exercer correctement leur mission ? Quand définirons-nous une politique du logement ambitieuse, permettant aux personnes vieillissantes de demeurer chez elles quand elles le souhaitent, grâce aux adaptations nécessaires ?

Toutes ces questions, nous y sommes confrontés au quotidien dans nos permanences, lorsque nous rencontrons les salariés du secteur, les responsables d'établissement et de service, et nos aînés, souvent inquiets de devenir une charge pour leurs enfants. Avez-vous réellement le sentiment de répondre à leurs angoisses avec la proposition de loi ?

Cette motion de rejet préalable est aussi, comme je le disais, une motion d'exigence : l'exigence politique de refuser de faire semblant ; l'exigence humaniste d'entendre l'inquiétude légitime de nos concitoyens au sujet des drames qui se jouent tous les jours et s'amplifieront immanquablement sans véritable réforme du grand âge ; l'exigence, enfin, d'un parlement respecté. Quand il s'agit de légiférer, nous ne pouvons pas continuer de travailler dans ces conditions, en étant renvoyés aux conclusions du CNR ou à d'hypothétiques engagements du ministre.

Monsieur le ministre, durant les débats de la commission, le mot « consensus » a souvent été mis en avant comme un mantra par les parlementaires de la majorité. Il est peut-être possible de dépasser l'incantation de façade : ajournons l'examen du texte et soumettez-nous votre projet de loi sur le grand âge.

Chers collègues, je vous invite à soutenir la motion de rejet préalable dans un souci d'exigence, pour ne pas consentir à la tactique des petits pas, pour ne pas être complices d'une PPL dont le seul titre est un mensonge et pour répondre avec honnêteté et courage aux souhaits de nos concitoyens, qui attendent que nous bâtissions une société dans laquelle chacun aura l'assurance de bien vieillir, quels que soient ses moyens et son territoire.

Je vous invite à voter pour le rejet de la proposition de loi afin de refuser clairement, dès aujourd'hui, que notre rôle de parlementaires soit subsidiaire, afin d'affirmer notre volonté de jouer pleinement notre rôle dans la définition d'une politique du grand âge, en réponse aux besoins exprimés par nos concitoyens et par les professionnels du secteur, et afin de contraindre le Gouvernement à respecter ses engagements.

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